AEX
0.0000
Pour l'éleveur d'Oupette, vache Limousine égérie du prochain Salon de l'agriculture, c'est "la reconnaissance". De son travail, mais aussi de celui de son père et de son oncle avant lui, dans un contexte éprouvant pour les agriculteurs qui peinent à transmettre leurs exploitations.
L'année n'a pas été de tout repos pour Alexandre Humeau: une partie de sa récolte de céréales, utilisée notamment pour nourrir ses bêtes, a été noyée par les pluies trop intenses tombées sur la Vienne (Nouvelle-Aquitaine).
Comme des milliers d'autres exploitations, l'éleveur de 38 ans n'a pas non plus été épargné par la fièvre catarrhale ovine (FCO), une maladie virale transmise aux ruminants par un moucheron et qui peut provoquer infertilité et avortements: "j'ai eu une quinzaine de vaches vides de plus par rapport à d'habitude", confie-t-il à l'AFP.
"L'année prochaine, on aura encore moins de veaux. Déjà qu'il y a une diminution du cheptel français en raison des personnes qui prennent leur retraite et qui ne sont pas forcément remplacées, si en plus les conditions sanitaires s'en mêlent..."
Mais la fierté d'avoir été sélectionné pour le Salon de l'agriculture avec sa "mascotte", star des concours locaux qu'il bichonne depuis sa naissance en 2018, compense les difficultés.
- Caractère bien trempé -
Chaque matin, l'éleveur lui apporte en premier un "petit-déjeuner spécial", plus conséquent en céréales afin d'entretenir les plus de 1.000 kilogrammes de cette Limousine à la robe typique froment vif et au caractère bien trempé dont le nom vient de sa houppette.
Elle a son propre enclos dans le hangar, partagé avec son quatrième veau, né le 25 décembre. "Un beau cadeau pour mes deux enfants... et pour moi", se réjouit Alexandre Humeau, qui aime accueillir les écoles du coin.
"Déjà tout petit, il venait avec moi, on voyait que c'était sa passion d'aller voir les veaux, les naissances et la sélection" pour les concours, se rappelle son père, retraité mais toujours en combinaison de travail.
Après un bac scientifique dans un lycée agricole, un BTS production animale puis une licence métiers du conseil en élevage bovin, il s'associe avec son père, deux oncles et deux cousins pour reprendre l'exploitation familiale.
En 2022, ils se séparent et Alexandre Humeau reprend seul, avec un salarié et un apprenti, la partie cheptel et ses 100 vaches-mères.
Trois ans plus tard, l'heure est à l'expansion, avec la construction d'un nouveau hangar pour rapatrier la deuxième moitié du troupeau, qui passe l'hiver dans un bâtiment loué à quatre kilomètres.
- "Toujours plus d'administratif" -
Il a aussi diversifié ses activités avec l'engraissement de 300 cochons sur paille et une production de sapins de Noël.
Il vend directement à la ferme, comme le faisait son oncle, 70% de sa production de viande bovine, découpée localement, et 10% de sa production de porc, transformée à proximité. Le reste est distribué par une coopérative et un magasin de producteurs.
Ce modèle est minoritaire dans la région, avec une filière Limousine Label Rouge qui peine à valoriser ses produits face à une grande distribution qui favorise de plus en plus l'entrée de gamme.
L'antenne locale du Secours populaire fait partie des clients de l'éleveur, qui se réjouit qu'une association privilégie la qualité.
"Ce qui me plaît, c'est le contact avec le consommateur", dit-il, même si, avec l'augmentation "du prix du bifteck", l'engouement observé pendant le Covid s'est un peu calmé.
La foule du Salon, qui s'ouvre le 22 février, ne lui fait pas peur mais il est plus sceptique sur le défilé des politiques: "on nous a fait des promesses il y a plus d'un an, aujourd'hui on n'en voit toujours pas la couleur", affirme-t-il, en écho à la colère des agriculteurs depuis début 2024 et aux nombreuses mesures annoncées mais repoussées, d'abord avec la dissolution de l'Assemblée puis avec la censure.
"On nous demande toujours plus d'administratif", "j'y passe une journée par semaine", au détriment du temps passé auprès de ses bêtes, se désole l'éleveur.
K.Tanaka--JT