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Les premiers résultats des élections aux chambres d'agriculture semblaient confirmer jeudi une percée de la Coordination rurale (CR) dans un paysage toujours dominé par l'alliance majoritaire FNSEA-JA, selon des données provisoires émanant des préfectures, des chambres d'agricultures et des syndicats.
Vers 18H30, les "bonnets jaunes" de la CR, qui avaient appelé à un vote dégagiste contre la FNSEA, revendiquaient "une majorité de sièges" dans sept nouvelles chambres, dont le Cher, les Ardennes, la Dordogne, l'Indre-et-Loire et la Gironde.
"Pour le moment, on voit basculer au moins sept chambres, en plus de celles qu'on va conserver en Lot-et-Garonne, Vienne et Haute-Vienne. Et ce n'est pas fini, on attend d'autres résultats", a déclaré à l'AFP Patrick Legras, porte-parole de la CR.
En Gironde, où la CR revendique la victoire avec six voix d'écart avec la liste FNSEA-JA, le président de la FDSEA Jean Samuel Eynard accusait le coup: "Les agriculteurs de Gironde ont fait leur choix... Nous avons 3 élus", contre 12 à la CR du fait du mode de scrutin favorisant la liste arrivée en tête.
En fin d'après-midi, l'alliance FNSEA-JA semblait l'avoir emporté dans une trentaine de départements, dont ses fiefs historiques du Nord, de Bretagne, mais aussi dans les Alpes-Maritimes, la Loire ou le Rhône, selon des résultats provisoires publiés par les chambres d'agriculture et le site agricole terre-net.
En Haute-Garonne, c'est la liste indépendante soutenue par Jérôme Bayle, figure du mouvement de protestation des agriculteurs début 2024, qui s'est imposée devant l'alliance majoritaire sortante, selon les résultats annoncés par la préfecture.
"Le monde agricole a besoin de changement. On veut casser le système. Il y a une fracture entre le terrain et le syndicalisme. Nous sommes une région oubliée, on ne se sentait plus représentés", a déclaré à l'AFP Jérôme Bayle, éleveur dans ce département durement frappé par la sécheresse et les maladies animales.
- "Renverser la table" -
La Confédération paysanne, syndicat qui plaide pour une "réelle transition agroécologique", pourrait s'imposer en Ardèche, selon les résultats provisoires publiés par les chambres.
S'il est encore trop tôt pour avoir une vision nationale du scrutin, il semble que dans de nombreux départements où les listes FNSEA-JA sont en tête, elles recueillent moins de suffrages que lors du précédent scrutin en 2019.
Il y a six ans, moins d'un agriculteur sur deux avait voté et la FNSEA, alliée aux JA, avait vu son hégémonie confortée.
L'alliance majoritaire s'était retrouvée, avec 55,55% des voix, à la tête de 97 chambres sur 101, tandis que la CR (21,5% des suffrages) ne détenait que trois chambres. Avec 20% des voix, la Confédération paysanne n'en avait qu'une, Mayotte, qu'elle conserve pour le moment, le scrutin y ayant été reporté après le cyclone Chido.
Quelque 2,2 millions d'électeurs, dont près de 400.000 chefs d'exploitation mais aussi des retraités, salariés ou propriétaires fonciers, étaient appelés à élire leurs représentants — par voie électronique ou postale — du 15 au 31 janvier.
Les opérations de dépouillement ont débuté jeudi dans la plupart des départements, mais certaines préfectures, notamment en Corse ou dans le Cantal, ne proclameront les résultats que vendredi.
Le ministère de l'Agriculture "communiquera des résultats électoraux consolidés (...) une fois l'ensemble des résultats départementaux proclamés", soit pas avant le vendredi "7 voire le 8 février", a-t-il indiqué à l'AFP.
La FNSEA organise jeudi soir une conférence de presse pour dresser un premier bilan du vote. De son côté, la Confédération paysanne prévoit de s'exprimer vendredi.
Dans la dernière ligne droite de la campagne, les syndicats ont tous dénoncé des "dysfonctionnements" voire des "irrégularités", laissant présager de nombreux recours.
La campagne a été rude, de l'avis de l'ensemble des syndicats.
Les bonnets jaunes de la CR, adeptes des opérations coup de poing, avaient dénoncé sans relâche la FNSEA, accusée de ruiner le modèle familial des fermes françaises après plus de 40 ans d'une "catastrophique cogestion avec l’État". Ils espéraient "renverser la table" et ravir 10 à 15 chambres.
La FNSEA, sûre de son ancrage historique, a reconnu une campagne dure, marquée selon un cadre du syndicat par un "populisme" et une forme de "radicalisation" imprégnant l'ensemble de la société.
Acteurs clés, les chambres d'agriculture sont des établissements publics qui conseillent et offrent des prestations aux exploitants — pour l'installation, la gestion de leur ferme ou la conformité avec la politique agricole commune (PAC) — tout en représentant les intérêts agricoles auprès des pouvoirs publics.
K.Abe--JT