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Une nouvelle étape dans l'accès aux soins en zone rurale: avec l'ouverture d'un septième centre de santé dans l'Indre, le collectif Médecins Solidaires accélère son mouvement de lutte contre les déserts médicaux, au grand "soulagement" des populations concernées.
C'est à Reuilly, petit village du Berry situé à 30 kilomètres de Bourges, que ce nouveau centre s'est implanté début décembre. En sept ans, ses deux derniers médecins ont quitté la commune, partis à la retraite, laissant les 2.000 habitants sans possibilité de se soigner.
Alors depuis l'ouverture, à l'accueil, l’effervescence ne retombe pas et le téléphone sonne sans discontinuer, confiant la difficile tâche aux deux coordinatrices de trouver des créneaux dans un planning complet sur plus d'un mois.
"Les gens sont hyper soulagés d'enfin d'être entendus, écoutés, pris en charge et d'avoir un suivi", résume Lucie Vannier, indiquant que plus de 300 rendez-vous avaient déjà été honorés en moins d'un mois.
Ce centre flambant neuf est une nouvelle étape pour le collectif Médecins Solidaires, lancé en 2022 par le Dr Martial Jardel, qui avait déjà ouvert six centres de santé dans le centre/centre-ouest de la France, dont quatre l'année dernière.
- "Tous touchés" -
"Si on ne peut pas demander beaucoup à un seul médecin, on peut demander un peu à beaucoup", répétait-il encore aux élus régionaux début janvier.
Chaque semaine, un médecin dit "solidaire", dont l'activité principale est souvent basée à plusieurs centaines de kilomètres, vient alors donner de son temps pour permettre au centre de santé de tourner.
Cette semaine-là, à Reuilly, c'est le Dr Clémentine Labouré, professionnelle de SOS Médecins à Paris, qui reçoit les patients.
"Comme les médecins classiques du collectif, on exerce chacun notre tour", explique-t-elle à l'AFP. "On est tous touchés en tant que médecins par le fait que des patients n'aient pas accès aux soinx".
Selon le Dr Labouré, "dans des zones où les gens n'avaient plus du tout accès à un médecin", "on a des patients qui abandonnent leurs soins, qui abandonnent leur suivi, qui avaient des traitements chroniques, qui ne les prennent plus, qui ne se font plus dépister".
Cette initiative permet de "les remettre dans le système de soins", ajoute-t-elle.
Tous les patients rencontrés décrivent leur "soulagement" et leur "joie" de retrouver la possibilité de se soigner, mais aussi une oreille à qui se confier. 27,5% d'entre eux ont même choisi le centre comme "leur médecin traitant".
- "Dynamique" -
Pour Danielle Chene, venue consulter pour des symptômes grippaux, "il était temps, parce que de toute façon, on n'a rien". "Même si on va plus loin, il y a des médecins qui ne nous prennent pas", peste la retraitée.
Ici, l'essentiel est assuré, "je peux renouveler mes ordonnances, faire mes analyses. C'est tout ce qu'il nous fallait".
La particularité d'un médecin qui change toutes les semaines, "c'est autant de points de vue différents pour examiner certaines pathologies", assure Liliane Barbier, venue renouveler l'ordonnance de sa mère, âgée de 94 ans.
Cette création de centre médical réjouit jusqu'à la mairie.
"Jusqu'ici, nos habitants, la plupart vieillissants, étaient sans médecins et sans moyen de locomotion à leur disposition, des personnes se retrouvaient sans soins", pointe Carole Baptista, l'édile de la commune.
Si l'association prend en charge le logement du professionnel et gère l'aspect administratif, la municipalité fournit les locaux, qu'elle a "rénovés", et finance ses frais de fonctionnement.
Des dépenses largement amorties, car avec des médecins, "c'est une dynamique au niveau de notre commune" qui se crée, "ça fait vivre notre pharmacie et par ricochet nos artisans, le boulanger... Je suis une maire ravie".
Dans le Centre-Val de Loire, territoire à la plus faible densité de praticiens, une convention a même été signée en juillet 2024 avec le conseil régional, la préfecture et l'ARS. L'objectif: assurer l'ouverture de cinq nouvelles maisons de santé dans la région.
Avec 550 médecins membres du collectif, les professionnels visent encore plus haut, et misent sur 20 centres effectifs d'ici 2027, sur tout le territoire.
"Si 10% des médecins venaient faire une semaine, on pourrait ouvrir 150 centres en France", dresse le Dr Labouré.
K.Nakajima--JT